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Négociation collective

Contestation du référendum de validation d'un accord collectif minoritaire, mode d'emploi de la Cour de cassation

Les contestations relatives aux consultations des salariés appelés à se prononcer sur la validation d'un accord d'entreprise minoritaire, qui se déroulent dans le respect des principes généraux du droit électoral, sont formées par voie de requête, les parties sont dispensées de constituer avocat et la procédure est orale.

Rappels sur le processus de validation d’un accord collectif minoritaire par référendum

En principe, pour qu’un accord collectif soit valable dans une entreprise dotée de délégués syndicaux, il doit être signé par un ou plusieurs syndicats représentatifs totalisant plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au CSE, quel que soit le nombre de votants (c. trav. L. 2232-12, al. 1). À défaut, l’accord n’est pas applicable.

Toutefois, si les syndicats signataires totalisent 30 % ou plus des suffrages exprimés en faveur des syndicats représentatifs au premier tour des dernières élections des titulaires du CSE, ces syndicats peuvent demander que l’accord soit soumis à référendum et ainsi validé directement par le personnel. À défaut d’initiative des syndicats dans le mois suivant la signature de l’accord, l’employeur peut lui-même décider d’organiser ce référendum (c. trav. art. L. 2232-12, al. 2 et s.).

Un référendum contesté devant le tribunal judiciaire

Dans cette affaire, deux syndicats représentatifs avaient sollicité l’employeur (une banque) afin qu’un référendum soit organisé pour valider deux accords collectifs signés le 31 décembre 2020 par des organisations syndicales non majoritaires mais représentant plus de 30 % des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles.

Un protocole d'accord relatif à l'organisation de la consultation du personnel avait été signé le 1er mars 2021 entre la banque et les quatre organisations syndicales représentatives puis le vote s'était déroulé du 17 au 19 mars 2021 par voie électronique.

Un syndicat avait saisi le juge judiciaire par requête du 1er avril 2021, invoquant des irrégularités dans le déroulement du scrutin. Trois autres syndicats s’étaient joints à l’instance.

Lors de l’audience du 18 mai 2021, ce syndicat s’était désisté mais l’un des autres syndicats avait alors soutenu oralement à l'audience, à titre reconventionnel, l'annulation du processus de consultation.

Cette demande d’annulation avait été déclarée irrecevable par le juge judiciaire, qui estimait que ce litige ne relevait pas d’une procédure orale mais écrite et qu’il aurait fallu que les parties soient représentées par un avocat.

La Cour de cassation casse ce jugement et en profite pour rappeler les règles du référendum

La Cour de cassation étaye sa décision par la combinaison de plusieurs textes issus de plusieurs codes.

Elle précise que la consultation des salariés appelés à se prononcer sur la validation d'un accord d'entreprise non majoritaire, qui peut être organisée par voie électronique, se déroule dans le respect des principes généraux du droit électoral et selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au CSE. L'accord est valide s'il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés (c. trav. art. L. 2232-12).

Elle rappelle que le tribunal judiciaire est compétent sur les litiges relatifs aux référendums visant à valider des accords d’entreprise non majoritaires (c. org. jud. art. R. 211-3-17 visant c. trav. art. L. 2232-12, L. 2232-23-1, L. 2232-24, L. 2232-26, L 2232-21 et L. 2232-23).

Elle rappelle aussi que les contestations relatives à l’électorat, donc à la liste des salariés devant être consultés, et à la régularité de la consultation sont rendues en dernier ressort par le tribunal judiciaire qui est saisi par voie de requête (c. trav. art. R. 2232-5 et R. 2314-24) et que les parties sont dispensées de faire appel à un avocat pour les contestations relatives à l'électorat, à l'éligibilité et à la régularité des opérations électorales en ce qui concerne l'élection des membres de la délégation du personnel au CSE, ce qui a pour conséquence de rendre la procédure orale (c. proc. civ. art. 761, 2°, art. 817 et c. org. jud. art. R. 211-3-15, 1°).

Il résulte de la combinaison de ces textes que les contestations relatives aux consultations des salariés appelés à se prononcer sur la validation d'un accord d'entreprise, qui se déroulent dans le respect des principes généraux du droit électoral, sont formées par voie de requête, les parties étant dispensées de constituer avocat.

Le tribunal judiciaire qui avait été régulièrement saisi par voie de requête ne pouvait donc pas la déclarer irrecevable.

L’affaire est donc renvoyée devant le même tribunal judiciaire autrement composé.

Cass. soc. 18 octobre 2023, n° 21-60159 FSB