Newsletter

Vie des affaires

Démarchage

Démarchage : le client non informé de son droit de rétractation peut se défaire du contrat sans payer les services fournis

En cas de démarchage, le professionnel a l'obligation d'informer le client sur son droit de rétractation. Omettre cette information, c'est donner la possibilité au client de se rétracter passé l'exécution du contrat, sans avoir à régler la prestation.

Démarcher un client en omettant de l'informer de son droit de rétraction...

Un droit européen de rétractation en cas de démarchage

À l'occasion d'un renvoi préjudiciel, la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) vient de préciser les contours de l'obligation pour un professionnel, dans le cadre d'un démarchage, d'informer le consommateur sur son droit de rétraction et les conséquences engendrées par son omission.

Cette obligation découle, rappelons-le, de la directive 2011/83 UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, qui a été transposée en droit français. Ainsi, en cas de démarchage, le consommateur bénéficie d'un délai de rétractation de 14 jours à compter de la conclusion du contrat, pour les contrats de prestations de services, ou de la réception du bien (c. consom. L. 221-5, L. 221-9 et L. 221-18).

À noter. Le renvoi préjudiciel permet aux juridictions des États membres, dans le cadre d’un litige dont elles sont saisies, d’interroger la CJUE sur l’interprétation du droit de l’Union européenne. La décision de la CJUE lie, de la même manière, les autres juridictions nationales qui seraient saisies d’un problème similaire.

Un client démarché se rétracte après l'exécution du contrat, sans payer

La problématique exposée devant la Cour était la suivante :

À la suite d'un démarchage, un client et une entreprise concluent oralement un contrat portant sur la rénovation de l'installation électrique d'une maison, sans que l'entreprise n'informe le client de son droit de rétractation. L'entreprise exécute la prestation et présente la facture au client, qui refuse de payer. Le client se rétracte, quelques jours plus tard, du contrat. Le litige est alors porté devant les juges, qui saisissent la CJUE.

La question posée à la Cour était de savoir si, du fait de l'absence d'information sur le droit de rétractation, le client était exonéré de toute obligation de payer les prestations fournies par l'entreprise en exécution du contrat.

... l'exonère de payer les prestations exécutées durant le délai de rétractation

L'enjeu financier derrière l'obligation d'informer sur le droit de rétractation

Pour mémoire, lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies au client pendant le démarchage, le délai de rétractation est prolongé de 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial de 14 jours (c. consom. art. L. 221-20). En pratique, le client peut alors se rétracter pendant 1 an et 14 jours.

Le client qui se rétracte d'un contrat de prestation de services dont l'exécution a commencé, à sa demande expresse, avant la fin du délai de rétractation doit verser au professionnel la somme correspondante au service fourni jusqu'à la communication de sa décision de se rétracter. Mais aucune somme ne sera due, si le client n'a pas expressément demandé l'exécution du contrat avant la fin du délai de rétractation (c. consom. art. L. 221-25).

Aucune compensation prévue pour le professionnel

Les juges se demandaient si la plus-value ainsi réalisée par le client ne contrevenait pas à l'interdiction de l'enrichissement sans cause.

La CJUE répond par la négative. La directive européenne sur les droits des consommateurs a pour objectif d’assurer un niveau élevé de protection aux consommateurs. Cet objectif serait, selon la Cour, compromis si l'on obligeait le consommateur à endosser, à la suite de sa rétractation, des coûts qui ne sont pas expressément prévus par la directive. En définitive, il revient donc au professionnel d'assumer la totalité des coûts.

Pour aller plus loin :

RF 2021-1, « Ventes aux consommateurs », §§ 1652, 1655 et 1708

CJUE, 17 mai 2023, aff. C-97/22